Le 1er Salon du Cross-Média Publishing a ouvert ses portes hier matin au Centre de congrès CAP 15. Il réunit jusqu’à ce soir, les principaux acteurs du document et du livre tant du côté Constructeurs, qu’éditeurs, imprimeurs ou fournisseurs du secteur.
Pour cette première édition, il règne un air d’innovation qui laisse un sentiment d’enthousiasme et d’inquiétude à la fois.
Les innovations touchent tous les aspects de la chaîne graphique:
– de la capture d’information
On découvre que les moyens mis en œuvre pour la création des documents numériques sont largement à maturité et permettent non seulement de faire du neuf avec du vieux (reprise numérique avec dynamisation des contenus) que de faire preuve de créativité (scénarisation des contenus avant publication physique ou numérique).
Les métiers de la rédaction, de l’image, de la vidéo… se parlent et se connectent en cohérence dans les projets qui prennent une orientation numérique toujours plus marquée.
– de la composition
L’association, au sein d’une même composition, de contenus sous la forme de variantes statiques ou dynamiques, en fonction du média adressé par l’utilisateur, est maintenant acquise (même si elle n’est pas encore généralisée, il est vrai).
La composition n’est plus bi-dimensionnelle dans le plan du document, elle est devenue tri-dimensionnelle (voire plus) prenant en compte ce qui va se passer en fonction des actions des lecteurs. La capture permanente du comportement n’est plus très loin. Les conséquences sur ‘l’expérience client’ sont prévues dès cette phase du projet numérique (ou pas).
– la restitution
L’industrialisation de la publication multi-canal est maîtrisée. On n’en est plus à se dire comment faire, on fait… (même si les problèmes techniques sont à régler au cas par cas). En revanche la stratégie Omni-canal, qui vise à assurer une continuité de l’expérience client quel que soit le changement de média opéré (Téléphone, PC, Tablette, Magasin,…), se heurte encore à la maturité des systèmes d’information des entreprises ainsi qu’à l’analyse des données capturées (Data Analytics, Big Data). Mais la voie est toute tracée et les premières solutions sont en place.
Il convient aussi de noter l’avancée des technologies de réalité augmentée qui sont très présentes et qui ouvrent de nouvelles pistes. Il s’agit généralement de photographier ou parcourir avec l’objectif d’un smartphone, tout ou partie d’un document statique (journal, revue,…) pour obtenir des liens pour l’accès à des informations ou des actions sur le Web, ou encore pour obtenir une animation vidéo (qui peut aussi être interactive) … pour en dire bien plus avec des vidéos qu’avec des mots.
Tout cela est très enthousiasmant mais l’inquiétude est pourtant présente car d’une part on constate que l’on peut concevoir, assembler et diffuser tout type de contenu sans pour autant être sûr qu’ils vont être pleinement exploités. Souvent, seuls les initiés sauront en tirer parti (au moins dans un premier temps). Cette inquiétude est partagée par les destinataires qui savent que même par jeu, ouvrir un Documix (ma proposition pour ces nouveaux objets destinés à des lecteurs), peut donner à l’émetteur une information marketing très précise sur le Docuacteur (ma proposition pour celui lit un document augmenté) qui peut voir son identité compromise.
Inquiétude enfin, pour les D&IM qui se demande bien comment ils vont assurer intégrité, conformité et conservation long terme de ces nouveaux médias.
Pour autant, ce qui est à retenir au-delà de tout cela, c’est que le document du futur est présent et qu’il ne demande qu’à conquérir le monde l’entreprise et du public pour vous/nous faire vivre de nouvelles expériences clients.
Ce Documix, tel que je l’ai appelé, participe aux fondements de l’Emotional Marketing. Vous savez, ce marketing qui touche à vos émotions pour vous faire réagir et mieux ainsi, vous connaître. Mais finalement, ce marketing vous connaîtra-t-il vraiment ou ne percevra-t-il de vous qu’une fraction de ce que vous êtes ? Je ne répondrai pas à cette question car il s’agit probablement ici de laisser le temps faire sont œuvre.
En revanche, dans l’une de mes interventions en conférence pour Doc@futur (et l’association XPlor France) lors de ce congrès, j’ai eu le plaisir de montrer la dualité entre Identité numérique et Identité réelle du quotidien. J’en ai conclu que nous allons individuellement devoir gérer une forme plus ou moins avancée de Schizophrénie numérique. Or, en écrivant ces quelques lignes, je pense que j’aurais aussi dû aborder ce que je nomme incidemment le Schizo-média. C’est bien ce Schizo-média que les D&IM vont devoir soigner après de longues heures d’apprentissage et de réflexion, afin qu’il ne raconte pas trop d’incohérentes conclusions sur les Docuacteurs de Documix.
Vivement la prochaine édition du Salon Cross-Média Publishing que l’on ait ensemble (vous, lecteurs de ces lignes avec les professionnels), l’occasion de discuter des tranquillisants à prendre régulièrement pour garantir la maîtrise des Documix, au-delà des informations, des contenus et des documents.
Jean-Pierre BLANGER
Vice-Président fi-D&IM
Directeur des Offres de Services Ricoh